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mercredi 24 juillet 2019

LA REFORME DES RETRAITES, version DELEVOYE.

Jeudi 18 juillet, s’est déroulée en présence d’Agnès BUZYN, Ministre des solidarités et de la santé, et de Jean-Paul DELEVOYE, Haut-commissaire à la réforme des retraites, une réunion de présentation aux partenaires sociaux des préconisations du HCRR. Cette réunion précédait la remise du rapport au Premier ministre. Elle conclut la concertation qui s’est déroulée depuis plus d’un an avec le Haut-commissariat.
Ce rapport a le mérite de démontrer qu’une réforme systémique des retraites (telle que la CFDT la porte depuis de nombreuses années) est possible. De manière globale, on peut distinguer des éléments qui conviennent à la CFDT, d’autres pour lesquels il nous faudra continuer à revendiquer du mieux, des éléments insuffisants, et enfin deux lignes rouges.
Les éléments du projet qui demandent à être améliorés :

-          Le niveau du minimum de pension : nous revendiquons 100% du SMIC net et non comme le propose le rapport 85% (ce qui était déjà l’objectif posé dans la loi de 2003 pour 2008 et non réalisé à ce jour),
-          L’indexation des pensions : nous demandons qu’elle prenne pour référence les salaires plutôt que l’inflation,
-          La majoration pour enfant : pour la CFDT, cette majoration doit être forfaitaire (et non proportionnelle au revenu) pour être davantage redistributive,
-          La réversion : notre revendication est d’en faire bénéficier au moins les personnes PACSées (et non simplement les personnes mariées). En outre, l’absence d’un plafond et d’un plancher pour la réversion peut être interrogée.

Les éléments insuffisants :
-          La garantie des droits acquis : il s’agit d’un point à approfondir car aujourd’hui, les règles de calcul ne sont pas détaillées. La CFDT restera vigilante pour que cette garantie soit effective et juste, quelle que soit la carrière et malgré la complexité de l'opération. Les droits des actifs ne doivent pas faire les frais de la réforme.
-          La pénibilité : Sa prise en compte est insuffisante aujourd’hui tant dans le privé que dans le public. La simple extension du C2P du secteur privé à la fonction publique et aux régimes spéciaux suite à la disparition progressive des catégories actives ne saurait suffire. Les seuils actuels sont aujourd’hui trop élevés, 4 critères sont désormais exclus du C2P et l’abaissement de l’âge de départ n’est que de 2 ans. Ne pas repenser le dispositif du C2P pourrait conduire à des injustices sociales.
-          La retraite progressive : même si le rapport préconise d’ouvrir la retraite progressive à l’ensemble des assurés, il n’y pas de volonté manifeste d’aller vers le droit au temps partiel au-delà d’un certain âge, ni d’inciter à recourir au temps partiel. Les recommandations du HCRR se focalisent sur le cumul emploi-retraite en le libéralisant sans plafond ni limite. La CFDT milite pour un véritable droit à l’aménagement des fins de carrière.
-          La gouvernance : à ce stade, le projet de la gouvernance du futur système et de la transition n’assure pas un réel partage du pouvoir entre l’Etat et les partenaires sociaux, qui sont pour la CFDT incontournables dans le pilotage du système de retraites. Le positionnement du gouvernement vis-à-vis des partenaires sociaux jusqu’à aujourd’hui incite à la plus grande prudence.
Les lignes rouges :
-          L’âge pivot : La CFDT est totalement opposée à l’introduction d’un âge du taux plein à 64 ans (avec décote et surcote) identique pour tous dès 2025 et qui figure dans le rapport. Cette mesure est anxiogène, contre-productive et injuste. Elle ignore la diversité des carrières et des situations professionnelles : seuls certains salariés sont en mesure de travailler plus longtemps (d’abord ceux qui sont en emploi, ceux qui n’exercent pas un métier physique ou pénible).
-          Le financement du système : La CFDT se félicite d’avoir obtenu que le gouvernement renonce à insérer dans le projet de financement de la sécurité sociale pour 2020 des mesures paramétriques (augmentation de la durée de cotisation par accélération de la réforme Touraine). Cette intention restera à confirmer à la rentrée.
Le HCRR recommande que le nouveau système soit à l’équilibre en 2025. L’objectif est louable mais la CFDT est en désaccord avec l’analyse du gouvernement sur l’origine du déficit du système de retraites. Le déséquilibre du système ne provient pas d’un dérapage des dépenses, mais de la diminution des ressources du fait de choix imputables au gouvernement (non-compensation des exonérations de cotisations CICE, forfait social, et désocialisation des heures supplémentaires).
Où retrouve t-on le curseur du Handicap et de la dépendance?

Ø La retraite pour incapacité permanente ouverte aux fonctionnaires et aux régimes spéciaux
La retraite pour incapacité permanente, qui ne concerne aujourd’hui que les régimes des salariés du privé et les régimes agricoles (salariés et non-salariés), sera ouverte aux fonctionnaires et salariés des régimes spéciaux.
Elle permettra aux assurés de partir à la retraite dès 60 ans en bénéficiant du taux de rendement de l’âge du taux plein.
Elle concerna les personnes souffrant d’une lésion liée à un accident du travail ou à une maladie professionnelle ayant entraîné :
● Une incapacité d’au moins 10% avec 17 ans d’exposition.
● Une incapacité d’au moins 20%.
Selon moi, ces curseurs semblent difficilement atteignables pour bénéficier de la retraite pour incapacité permanente. 17 ans d'exposition, 20% au mons d'incapacité. Une simple prédiction me vient à l'esprit, le parcours du combattant va se durcir pour les PSH ou dépendantes.

Ø Proches aidants : attribuer des points de retraite au titre des périodes d’accompagnement
Le système universel renforcera les garanties offertes aux personnes venant en aide à un proche en situation de perte d’autonomie liée à l’âge ou au handicap. L’objectif est d’améliorer la prise en compte de la situation des proches aidants dans la constitution de leurs droits à retraite.
Conformément à l’engagement du Président de la République à l’occasion de la conférence de presse du 25 avril 2019, un nouveau dispositif unique de garantie de droits à retraite pour les aidants sera créé.
Il permettra d’acquérir, dans le système universel, une garantie de points au titre des périodes pendant lesquelles un assuré s’occupe d’une personne handicapée (enfant ou adulte), d’une personne âgée en situation de perte d’autonomie ou d’une personne malade.
Ce nouveau dispositif aura vocation à améliorer le niveau de compensation et à rendre plus lisible et plus équitable la prise en charge de la situation des aidants au moment de la retraite, alors qu’aujourd’hui les dispositifs existants sont épars, très hétérogènes selon les régimes de retraite, et peu identifiables par les assurés.
En effet, les dispositifs actuels reposent sur des périmètres non harmonisés, tant pour ce qui concerne les conditions propres à la personne aidée que celles relatives à la personne aidante. Ceci est source de complexité et d’incertitude pour les aidants.
Ce nouveau dispositif compensera les préjudices de carrière liés aux périodes pendant lesquelles le proche aidant accompagne une personne handicapée, une personne âgée présentant une perte d’autonomie d’une particulière gravité ou un enfant malade. Il prévoira l’attribution de points au titre de ces périodes d’aide. Celles-ci permettront d’apprécier les situations diverses que recouvrera le dispositif, puisque les impacts sur la retraite pourront être plus marqués dans certains cas, comme par exemple lorsqu’un parent devra s’occuper durablement de son enfant en situation de handicap.
La prise en compte des droits à retraite s’articulera avec la réflexion conduite sur l’indemnisation du congé de proche aidant.
Enfin la situation des proches aidants avance, mais ma crainte est que ce ne soit que de belles promesses, qui risquent de se voir retoquer par les tenants libéraux du Gouvernement et de Bercy. Un futur cadeau aux assureurs privés? Les Lobbyistes affutent déjà leurs armes