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lundi 4 avril 2016

Travailler avec une personne en situation de handicap, ça change quoi dans l'équipe ?


Toujours absents, de vrais boulets au travail, etc… les stéréotypes sur les personnes handicapées ont la vie dure. Surtout tant qu’on n’a jamais bossé avec un collègue ou un collaborateur handicapé. Nous avons donc demandé à 6 salariés de nous raconter leur quotidien aux côtés de collègues ou collaborateurs en situation de handicap. Morceaux choisis.
Isabelle Ortiz, responsable clientèle et chef de projet au sein de l’agence de communication adaptée Sabooj. Sur 10 salariés, 7 sont en situation de handicap psychique ou physique.
« Travailler avec tous ces collègues handicapés suppose davantage d’attention portée à l’humain que dans une entreprise classique. La parole est plus libérée. L’entraide et la solidarité sont plus importantes. Cela nécessite également plus de compréhension. Quand les uns ou les autres sont absents, on ne se dit pas "quel tire-au-flanc", on essaie d’être empathique sans être dans la compassion. Je ne suis pas assistante sociale. Donc on prend des nouvelles, on s’intéresse, on pose des questions mais ça s’arrête là. D’ailleurs, j’ignore la pathologie exacte de certains de mes collaborateurs. L’empathie va des salariés valides envers les collaborateurs handicapés et inversement. Mais c’est également bénéfique entre personnes valides. L’attention aux autres rejaillit sur toute l’équipe ».
2 - Sophie Decuignière, responsable de l’excellence opérationnelle chez Carrefour Supply Chain. Elle travaille avec Patrick, en charge de la gestion de la performance des entrepôts, atteint de surdité et appareillé.
« Lors de ma première rencontre avec Patrick, je n’avais pas d’appréhension particulière, je me disais "on verra bien". Et j’ai rapidement compris que c’est le regard que nous portons sur les personnes handicapées qui créé des limites et pas leur handicap. Ils ont des talents et tous nos préjugés sont faux. Pour échanger avec Patrick, il faut de préférence être en face de lui et tout se passe bien. Sauf quand son dispositif auditif a un bug. Mais son humour et sa capacité à tourner son handicap en dérision permettent toujours de dissiper un éventuel malaise. Du coup, tout se passe bien. En travaillant avec lui, j’ai découvert qu’il avait une force de caractère supérieure aux nôtres et j’apprécie sa bonne humeur constante. Il se plaint rarement et dans une situation complexe, c’est toujours lui qui positive. Au contact de Patrick, je m’enrichis. En cas de tension, je me pose, je réfléchis au lieu de partir au quart de tour. Prochainement, je vais participer au raid Handi’Valid de l’association Free Handi’se avec Bernard, un autre collaborateur handicapé. J’aime l’idée de s’élancer par équipe de 4, 2 valides et 2 personnes handicapées et de couper la ligne d’arrivée ensemble. Un exercice de cohésion grandeur nature et qui devrait mettre une claque aux préjugés sur les personnes handicapées ».
3 - Nezha Ben Amar, pilote pièces chez Snecma (groupe Safran). Elle travaille au quotidien avec Thomas, un collègue malentendant.
« Pour faciliter la communication, Thomas m’a initié à la langue parlée complétée (LPC). Un système de codes basé sur des signes de la main. J’ai appris par cœur certains mots et la mise en pratique quotidienne me permet de coder les conversations pour Thomas, notamment lors des réunions. Ensemble, on parle souvent de son handicap. Parfois, ça l’énerve mais, la plupart du temps, il prend ça avec humour. C’est un collègue comme un autre : bosseur, fonceur, professionnel avec les mêmes objectifs que tout le monde et qui ne se met pas à l’écart. Je n’ai pas de compassion pour lui mais au contraire beaucoup d’admiration. Parfois, voire souvent, je devance ses demandes car je n’ai pas envie qu’il se retrouve dans des situations compliquées. En ce moment, on réfléchit à un système de codage par un tiers via internet qui lui serait utile pour son évolution de carrière et le rendrait encore plus autonome. La présence de Thomas apaise l’ambiance dans l’équipe. Même en situation de stress, on est obligé de parler moins vite, de respirer et de se poser. L’atmosphère est donc plus détendue »...
La suite et la fin de ce florilège de tranche de vie sur le site cadremploi