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jeudi 27 juin 2019

Handicap : Modalités de mise en œuvre de l'OETH par l'application d'un accord agréé

Un décret entrant en vigueur le 1er janvier 2020, pris pour l'application de l' article L. 5212-8 du Code du travail dans sa rédaction issue de l'article 67 de la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 , définit les modalités de mise en œuvre de l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés (OETH) par l'application d'un accord. Il précise les mentions que doit prévoir l'accord agréé d'entreprise, de groupe ou de branche et les règles de calcul des sommes consacrées au financement de ces actions, ainsi que les modalités de reversement aux organismes sociaux des sommes correspondant aux actions non réalisées. Il détermine également les modalités d'agrément, le suivi de la mise en œuvre de ces accords et les conditions de renouvellement de l'accord.
L’on rappellera que l'employeur peut s'acquitter de son obligation d'emploi en faisant donc application d'un accord de branche, de groupe ou d'entreprise agréé prévoyant la mise en œuvre d'un programme pluriannuel en faveur des travailleurs handicapés pour une durée maximale de 3 ans, renouvelable une fois (C. trav., art. L. 5212-8, version à venir au 1er janvier 2020).
1-    Modalité d’agrément de l’accord.
Pour que cet accord soit agréé, le programme pluriannuel - établi par année civile - qu'il prévoit, doit comporter un plan d'embauche et un plan de maintien dans l'emploi dans l'entreprise. Ces documents sont assortis d'objectifs, au nombre desquels doivent notamment figurer, pour chaque année d'exécution du programme, le nombre de bénéficiaires de l'obligation d'emploi rapporté à l'effectif d'assujettissement et le nombre de ces bénéficiaires dont le recrutement est envisagé. Ils précisent en outre le financement prévisionnel des différentes actions programmées (C. trav., art. R. 5212-12 modifié).
L'accord est transmis pour agrément à l'autorité administrative compétente par la partie la plus diligente au plus tard le 31 mars de la première année de mise en œuvre du programme, selon des modalités devant être définies par arrêté, les autorités administratives compétentes pour délivrer l'agrément étant :

Ø Pour l'accord de branche, le ministre chargé de l'emploi ;

Ø Pour l'accord d'entreprise, le préfet du département où est situé le siège de l'entreprise ;

Ø Pour les accords de groupe, le préfet du département où est situé le siège de l'entreprise dominante définie à l'article L. 2331-1 du Code du travail.
L'agrément est délivré pour la durée de validité de l'accord, l'autorité administrative prenant en compte la nature, la portée et la cohérence des différentes actions envisagées ainsi que le respect des conditions, mentionnées à l'article R. 5212-12, d’agrément de l’accord (C. trav., art. R. 5212-14 et art. R. 5212-15 modifiés).
2-    Conditions de renouvellement de l'accord.
L'agrément de l'accord peut être renouvelé une fois par l'autorité compétente pour une durée maximale de 3 ans, selon des modalités devant être définies par arrêté. Le renouvellement est accordé après présentation, selon les cas, au comité social et économique ou au comité de groupe, ou après examen par la branche, du bilan du programme exécuté et de la demande de renouvellement. Il est tenu compte du bilan quantitatif et qualitatif du programme réalisé ainsi que du nouveau programme pluriannuel élaboré (C. trav., art. R. 5212-18 modifié).
3-    Financement des actions. 
Le montant du financement par l'employeur du programme pluriannuel est au moins égal, par année, au montant de la contribution annuelle, mentionnée à l'article L. 5212-10, dont peuvent s’acquitter les employeurs pour satisfaire à l’obligation d’emploi, due au titre de cette même année, à l'exclusion des dépenses mentionnées à l'article L. 5212-11 prises en compte au titre de la déduction prévue par ce même article (C. trav, art. R. 5212-12 modifié).
Le montant est révisé chaque année sur la base de celui de la contribution qui aurait dû être versée l'année précédente, à l'exclusion des déductions mentionnées à l'article L. 5212-11 .
Les montants de financement annuels prévus au titre du programme qui n'ont pas été dépensés sont reportés sur l'année suivante (C. trav., art. R. 5212-13 modifié).
Lorsque le programme comporte des actions de sensibilisation des salariés de l'entreprise ou des actions de pilotage et de suivi, les sommes consacrées au financement de ces actions ne peuvent excéder 25 % du total des sommes consacrées au financement des actions prévues par l'accord (C. trav., art. R. 5212-12 modifié).
 
4-    Suivi de la mise en œuvre des accords.
 
L'employeur doit dresser un bilan annuel de la mise en œuvre de l'accord qu'il présente, selon les cas, au comité social et économique ou au comité de groupe. La mise en œuvre des accords de branche fait également l'objet d'un bilan annuel (C. trav., art. R. 5212-16 modifié).
Dans les 2 mois qui suivent le terme de l'accord, l'employeur ou la branche doit transmettre à l'autorité administrative compétente :

Ø Les bilans annuels et le bilan récapitulatif des actions réalisées dans le cadre de l'accord, en précisant leur financement ;

Ø Le solde des dépenses exposées pour la mise en œuvre du programme au regard du montant des contributions mentionnées à l'article L. 5212-10.
L'employeur ou la branche communique également, à la demande de l'autorité administrative compétente, les pièces justificatives nécessaires au contrôle du bilan récapitulatif des actions réalisées (C. trav., art. R. 5212-17 modifié).
5-    Report et reversement des sommes correspondant aux actions non réalisées.
Si les dépenses réalisées pour la durée du programme sont inférieures au montant total des contributions, à l'exclusion du montant des dépenses déduites au titre de l'article L. 5212-11, l'employeur procède au versement aux organismes sociaux, mentionnés aux articles L. 213-1 et L. 752-4 du Code de la sécurité sociale et à l'article L. 723-2 du Code rural et de la pêche maritime, des sommes équivalentes aux dépenses prévues par l'accord et non réalisées.
Par ailleurs, si l'autorité administrative compétente fait droit à la demande de renouvellement, elle peut autoriser le report total ou partiel de ce solde sur le nouveau programme. À défaut de renouvellement, cette autorité adresse à l'employeur, par tout moyen permettant de donner date certaine à sa réception par le destinataire, une notification du montant à régler. Une copie de cette notification est adressée à l'organisme de recouvrement des cotisations de sécurité sociale dont dépend l'employeur. Le montant dû est déclaré et versé par l'employeur à l'organisme chargé du recouvrement des cotisations de sécurité sociale. Ce versement est effectué à la première date d'échéance des cotisations et contributions sociales dont il est redevable auprès de cet organisme intervenant à l'issue d'un délai de 2 mois suivant la réception de la notification (C. trav., art. R. 5212-19 modifié).
6-   Mon  Analyse

Je m'interroge sur la pertinence des accords agréés sur le sujet du Handicap. D’autant plus que  les résultats finaux de ces accords, homologués ou non par la DIRECCTE, sont plus que mitigés. En moyenne, l’impact sur l’emploi a été estimé par la DGT et la DIRECCTE a + 0.8% sur la durée de l’accord.
Rappelons que le taux de chômage des travailleurs handicapés est de 20%, soit plus du  double de la population valide. En 2018, seul 18 000 travailleurs handicapés ont pu être maintenus dans l’emploi (Chiffres AGEFIPH). Alors que, chaque année 170 000 travailleurs perdent leur emploi pour une inaptitude. (Source DARES)
Pour moi, ces accords libératoires, à la contribution AGEFIPH, sont un moyen de contournement, pour les entreprises ou les Branches, à ne pas respecter leur obligation d’emploi (6% de TH dans leurs effectifs pour les entreprises de + de 20 salariés), et s’assurer une visibilité sociétale à moindre frais. Même si la loi du 5 septembre 2018 limite le nombre d’accords, la durée et le renouvellement, de nombreuses entreprises ou branches mettent la pression sur leurs IRP, ou négociateurs de Branches afin de conclure un accord avant le 1er janvier 2020, et ainsi profiter des nouvelles dispositions par la suite.
 Lors de la concertation j'avais demandé que, seule les entreprises ou Branches négociant un primo accord devaient être éligibles à ce nouveau dispositif. Mais le lobbying du MEDEF et de deux organisations syndicales a fait pencher la balance vers le statu quo. De plus, la question du renouvellement des accords après le 1er janvier 2020 a été là aussi une bataille de lobbyistes. Je prône que le CSE et les IRP doivent être non seulement informés, mais surtout doivent rendre un avis conforme à la demande de l’employeur ou de la branche. D’autant plus si l’accord initial n’a été qu’un jeu de dupe.
Dans ce cadre, La CFDT doit demander à ses négociateurs d’être vigilants quant à la demande de renégociation d’accord, à leur contenu et au bilan qualitatif. En particulier :
Ø Sur la durée de l’accord. En effet, de nombreuses sociétés pressent leurs IRP pour renouveler leur accord qui arrive à échéance avant 2020. Pensant que ce tour de passe-passe leur permettra de bénéficier, par la suite, des dispositions post 2020. Ce pari sera perdant, car l’Administration considèrera l’accord comme un renouvellement et pour une durée de 3 ans maximum.
Ø Sur l’emploi direct, le maintien dans l’emploi ;
Ø Sur le nombre de licenciement, de rupture conventionnelle ou de démission ;
Ø Sur la lutte contre la désinsertion professionnelle des Bénéficiaires de l’OETH ;
Ø Sur le fait que le Handicap soit pleinement imbriqué dans la politique RSE de l’Entreprise ou de la Branche ;
Ø Les moyens alloués au référent handicap (fiche de poste, temps alloué suffisant pour exercer son activité,.. etc.) et le fait que ce soit un « tiers de confiance ». C’est-à-dire sans aucun lien hiérarchique direct.
Ø Sur la sous-traitance, elle n’est pas là pour combler des postes qui pourraient l’être via l’emploi direct, les CDD tremplins par exemple ;
Ø Sur la Formation, qui doit permettre au bénéficiaire de l'OETH de s'inscrire dans une gestion prévisionnelle de son parcours de carrière. Le décret n°2019-566 du 7 juin 2019 publié au JO du 8 juin 2019 définit les modalités de majoration de l'alimentation du compte personnel de formation (CPF) pour les salariés bénéficiaires de l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés (OETH). Soit  une majoration de 300 euros par an. Cette majoration se fera soit via la DSN, si l’employeur connait la situation de handicap de son collaborateur, soit via une démarche individuelle du travailleur, lors de l’ouverture de son compte CPF (ou sa mise à jour) où il indiquera sa situation de handicap en cochant une case. Charge à lui de transmettre le document de reconnaissance administratif de son handicap.
L’opérateur gestionnaire est la CDC (Caisse Des Dépôts).